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"La danseuse aux petits pois"
14 février 2010

Ma petite bibliothèque

Alors que la neige continue à tomber au pays des violettes, La danseuse en profite pour soigner son rhume et lire un peu sous la couette. Le dernier livre qui m'a tenu en haleine est une belle découverte grâce au conseil d'une bloggeuse (pardon mais je ne sais plus de qui il s'agit, mais si elle passe par ici elle se reconnaîtra). Il s'agit du premier roman de Carole Martinez, récompensé par 8 prix littéraires dont le Prix Etonnants Voyageurs et le Prix Renaudot des lycéens 2007

A voir son interview : http://www.web-tv-culture.com/le-coeur-cousu-carole-martinez-79.html

Le coeur cousu de Carole Martinez, éditions Gallimard, coll. "folio", 2008, 443 p.

Le coeur cousu est un roman qui se lit comme un conte fantastique.  L'histoire débute dans un petit village andalou, Santavela, au début du XXe siècle, dans une Espagne en proie à une agitation révolutionnaire. Frasquita, jeune fille de 16 ans, est issue d'une lignée de bohémiennes qui se transmettent depuis la nuit des temps une mystérieuse boîte contenant des fils et des aiguilles à coudre. Frasquita devient une couturière aux doigts magiques et réussit à transformer des bouts de chiffons en la plus belle des robes. Elle se marie avec Carasco, un jeune paysan, avec qui elle aura cinq enfants, qui semblent eux aussi pourvus d'un don surnaturel. Mais Carasco se passionne pour un coq de combat et finit par jouer ses meubles, sa maison et sa femme. Condamnée à l'errance, Frasquita s'enfuit avec ses enfants à travers une Andalousie secouée par les révoltes paysannes. Elle croise le chemin d'un groupe d'anarchistes et recoud le visage déchiquté d'un guérillero nommé Salvador. Neuf mois après, un autre enfant vient à naître. Il s'agit de Soledad, la narratrice du roman. Dans la dernière partie du livre, Frasquita et ses enfants franchissent l'Autre rive et s'installent en Algérie, où ils connaîtront tous un destin des plus étrange...

Extrait : "le drapeau", pp. 312-314.

"Frasquita est restée deux mois aux côtés du Catalan, le temps de lui broder son drapeau. Sans doute serait-elle restée plus longtemps si la révolution ne s'en était mêlée. Sans doute ne serions-nous pas de ce côté du monde si Salvador n'avait pas eu d'autre amante. (...) Ma mère, elle, n'avait rien laissé dans les grottes. Inépuisables bobines de fil, aiguilles, épingles et petits ciseaux finement ouvragés étaient serrés dans ce sac aux couleurs de l'oliveraie qu'elle portait jour et nuit en bandoulière. La bourse offerte par Salvador et aussitôt attachée sous ses jupes continuait de battre contre sa jambe, rythmant parfois sa marche d'un léger cliquetis quand le noeud de l'aumônière se relâchait. Sa charrette était là aussi, dans laquelle les anarchistes l'avaient plantée toute droite vêtue de son éternelle robe de noces étoilée de fleurs de tissu, de boue et de sang.

Elle accepta de suivre Salvador le temps de lui broder son drapeau. Symbole de cette cause qu'il avait épousée. Un drapeau destiné à lui servir de drap le soir des noces. Sans le savoir, elle brodait un trousseau à cet homme nu.

Elle prit sont temps. Sur l'étoffe que Salvador lui avait offerte _ un drap de lin volé dans lequel, selon la légende, avait dormi une tête couronnée de passage dans la région _, elle appliqua des morceaux d'autres tissus arrachés lors des rapines dans les haciendas ou récupérés sur les cadavres des anarchistes. Chacune de leurs actions emportait un ou deux compagnons et Salvador avait pris l'habit des hommes tombés, reliques sur lesquelles Frasquita travaillait ses broderies avant de les monter par sertissage sur son drapeau.

Les anarchistes lui avaient fabriqué un métier qu'ils se chargeaient de démonter et de remonter chaque fois que leur groupe devait se déplacer.

Le drapeau de Salvador et cette femme qui y travaillait sans relâche inspiraient à tous un respect religieux.

Jamais elle ne défit le travail fait la veille pour rester plus longtemps à ses côtés. Elle prit son temps car l'ouvrage se devait d'être parfait, à l'image de l'amour que Salvador portait à sa révolution, à l'image du visage de cet homme et de son espérance.

Rapiécé, mais parfait.

Elle goûtait la paix, mais savait que tout cela n'aurait qu'un temps et qu'une main mystérieuse travaillait avec la sienne au drapeau ensorcelé. (...)

Pourtant un matin, Frasquita apporta le drapeau soigneusement plié à cet homme qui le lui avait demandé. "Ton drapeau est achevé", lui dit-elle en lui tendant son oeuvre.

Avec l'aide de Quince, Salvador le déplia sur le sol. Le motif mystérieux inspirait une sensation d'harmonie et de plénitude. Rien de figuratif, mais la mosaïque de tissus assemblée par des doigts d'artiste créait un univers neuf et absolument entier.

L'enthousiasme dégagé par le tableau était contagieux. Il donnait envie de respirer le monde à pleins poumons, d'en jouir les paumes ouvertes, de tous ses sens, d'en vivre plus intensément chaque instant. Il fourmillait de force, de désir, de joie, de passion, d'idéal. Ses couleurs vibraient au soleil automnal, formidables. Tout avait été cousu sur la toile, l'espoir, l'avenir, la guerre, la paix, le monde, les hommes et les femmes, et tout cela tenait ensemble, comme accordé depuis toujours. La révolution qui trouvait ici son expression menait à un nouvel âge d'or."

Découvrez la playlist danse de la vie brève avec Pedro Ibanez

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Commentaires
V
oignes bien ton rhume !! ton livre me tente je risque d'aller l'acheter bisous et bonne journée (de la part de clochette de macaronocafe car je suis chez ma soeur capucinorosethe)
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W
C'est vrai ça donne envie de le lire...<br /> j'ai pris des photos aux "aiguilles en fête", j'ai pensé à toi quand j'ai vu 2 costumes du Lac des Cygnes ;)(je les mettrai sur mon blog).<br /> bises
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D
C'est vrai que ce livre donne envie de le lire.<br /> JE note les références et le commande à la bibliothèque municipale de Dijon. A moins qu'elle l'ai déjà.<br /> Bises et soigne toi bien !
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